Le projet de François Cheng est clair : « En ces temps de misères omniprésentes, de violences aveugles, de catastrophes naturelles ou écologiques, parler de la beauté pourra paraître incongru, inconvenant, voire provocateur. Presque un scandale. Mais en raison de cela même, on voit qu’à l’opposé du mal, la beauté se situe bien à l’autre bout d’une réalité à laquelle nous avons à faire face. » (p. 13) Fondée sur l’idée de Dostoïevski que « la beauté sauvera le monde », la réflexion de Cheng est véritablement un message d’espoir : non, le monde n’est pas perdu. Le fait que la beauté existe, malgré son inutilité socio-économique, est le signe que l’homme est capable d’une transcendance qui le sauve.
De page en page, le propos de François Cheng se fait érudit – quand il compare les traditions taoïste, confucianiste et chrétienne – puis spirituel – au moment de s’émerveiller devant la capacité de l’homme à toucher par le beau une part d’éternité, éternité qui « ne saurait être faite que d’instants saillants où la vie jaillit vers son plein pouvoir d’extase. » (p. 50). On ne peut ici ne pas penser à l’enthousiasme de saint Grégoire de Nysse qui, au Ve siècle, décrivait la vie en Dieu comme un chemin « de commencement en commencement, par des commencements toujours nouveaux ». Parcourant tour à tour la Joconde, le Yin et le Yang, en passant par la mimèsis et la catharsis, Cheng nous invite dans un monde où la beauté est pour l’homme « l’élévation d’une présence dans le temps comme avènement. » (p. 122) Laissons-nous donc guider sur ce chemin où esthétique rime avec mystique, et goûtons la beauté que l’auteur nous offre en ces pages.
François CHENG, Cinq méditations sur la beauté, Paris, Albin Michel, 2006, 161 p.
2 commentaires:
Merci Sébastien pour cette jolie page.
J'ai toujours aimé croiser, voire marier mes lectures et "mes" auteurs ; et ces "Cinq méditations sur la beauté" de Maître Cheng ont trouvé chez moi leur écho dans "La beauté pour sacerdoce" de Dominique Ponnau : "Dans la beauté (...), je ne puis m'empêcher d'entendre, de laisser retentir en moi le murmure tremblant, l'invitation discrète, hésitante, toute en flux et reflux, toujours reviviscente, à pressentir en ces voix merveilleuses de la nature et de l'art l'écho d'une autre voix, chantant silencieusement en moi le chant inouï, celui d'un mystérieux ineffable dont il se pourrait que, fût-il imprononçable, il ait un Nom."
En amitié,
Gautier.
C'est bien interessant tout cela... Je vais le lire alors !
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