mercredi 30 janvier 2008

Lytta Basset : Sainte Colère – Jacob, Job, Jésus


La parution de ce livre de Lytta Basset, pasteur protestant suisse, a été largement commentée. Quoi ? la colère pourrait-elle avoir quelque chose à voir avec la sainteté ? C’est sur un chemin qui va des origines (livre de la Genèse) jusqu’au Christ que Lytta Basset nous guide, où elle relève les colères des trois grandes figures que sont Jacob – luttant contre l’ange – Job – attaqué même par ses amis – et Jésus, venu apporté non pas la paix mais le glaive (cf. Mt 10, 34).


La thèse de Lytta Basset est la suivante : c’est par la colère que se construit une foi vivante, adulte, et vraiment personnelle. La colère est un fait, un constat ; nul ne doit l’expliquer : « la question n’est pas du tout de savoir si tu as raison ou tort d’être en colère ; il se trouve que tu es en colère, ou que l’autre t’en veut, c’est ainsi – principe de réalité ! » (p. 78)


Dans une prose parfois difficile, très technique – c’est le discours d’une exégète – et souvent répétitif, Lytta Basset creuse et approfondit sa connaissance des trois grandes figures qu’elle nous invite à scruter. Sans cesse elle remet sur le métier les paroles et les actes de ces personnages, pour en découvrir peu à peu le sens. Et comme souvent, c’est bien la figure du Christ qui nous permet de comprendre celles de l’Ancien Testament. Comment comprendre les paroles dures de Jésus à l’égard de sa famille (cf. Mc 3, 33) ou sa réaction violente face aux marchands du Temple (cf. Jn 2, 15) ?

C’est à partir de la parole de Mt 10, 34 :


N’allez pas croire que je sois venu apporter la paix sur la terre ;

je ne suis pas venu apporter la paix, mais bien le glaive


que l’auteur soutient sa thèse : « La parole tranchante de l’Evangile nous invite à accueillir les temps de conflit et de crise non comme une calamité mais comme le temps douloureux d’une naissance : consentir à être séparés, différenciés, départagés d’autrui et de tous les autres va nous permettre d’accéder enfin à cette part qui nous est propre. » (p. 224)


C’est sans doute une heureuse leçon pour tous ceux qui ont peur de la colère dont ils craignent qu’elle ne soit le signe d’une rupture de la relation. Bien au contraire, Lytta Basset soutient que la colère exprimée est le signe du désir que la relation continue, que le lien subsiste et que la crise se résolve pour devenir féconde. En cela, on peut en effet parler de sainte colère.




Lytta Basset, Sainte Colère – Jacob, Job, Jésus, Bayard, « Labor et Fides », Genève, 2002 (325 p.)


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